Bonjour à toustes! Cela faisait quelque temps que je n'avais pas écrit sur Leaflet et pour me rattraper de ma dispersion sur plusieurs blogs, j'ai regroupé mes précédents articles sur un seul blog, avec en bonus, l'arrivée d'un concept que j'avais en tête et qui pourrait faire des petits.
Sur ce bonne lecture!
Avertissement: Les paragraphes suivants contiennent des spoilers par rapport à Famous Last Words: Dr Jane Goodall et la série Andor. Il est recommandé de les avoir vus auparavant si on ne veut pas gâcher le plaisir de leur découverte.
La découverte d'extraits de l'interview de Jane Goodall, Famous Last Words, diffusée sur Netflix après son décès, le 1er octobre dernier, m'a inspiré un rapprochement que j'ai concrétisé en un "schtroumpf" sur Bluesky, à la base du meme "They're the same picture" tiré de la série The Office.
Bon, le but de cet article n'est pas juste de justifier un blousque en partie écrit sur le ton de la blague (et de faire une autopromo éhontée), mais bien de voir ce qu'il y a en commun entre les dernières déclarations de Jane Goodall et le dernier discours de Maarva Andor, interprétée de manière impeccable par Fiona Shaw, visible dans le dernier épisode de la première saison d'Andor, disponible en intégralité.
Avant de rentrer dans le vif du sujet, une précision s'impose: bien que le fait qu'elle soit une "icône" constitue un des points de son interview dans Famous Last Words, Jane Goodall était une personne bien réelle, dont l'héritage que ce soit aussi bien d'un point de vue scientifique que militant est considérable. C'est pour cela, que aussi subtil et profond soit le personnage fictif avec qui elle est comparée, il ne peut y avoir d'équivalence stricte entre les deux. Il s'agit bien des discours respectifs, dont un appartient à celle qui le prononce, l'autre aux créateurices de la série Andor, qu'on va comparer.
Un message aux vivant.e.s
Je vais dans un premier temps, m'attarder sur le discours de Jane Goodall laisse aux générations futures qui est visible dans la vidéo dans le post ci-dessous, en mettant de côté le premier extrait. Elle s'adresse ici directement à la caméra en l'absence d'interviewer.
Dr. Jane Goodall filmed an interview with Netflix in March 2025 that she understood would only be released after her death.
Si on repense au discours funéraire d'Andor, plusieurs parallèles sautent aux yeux.
D'abord, les deux dames sont des figures importantes de leurs communautés respectives. Jane Goodall, comme on a pu le voir, était une personnalité respectée et très écoutée au delà même de la communauté scientifique, tandis que Maarva Andor était une sommité de la planète Ferrix, étant elle-même membre des Daughters of Ferrix et la foule à son enterrement atteste de l'attachement qu'elle suscitait.
Ensuite, et c'est le plus évident, il s'agit dans les deux cas de discours diffusés après la mort des dames qui les prononcent. Et les deux en sont conscientes, Jane Goodall choisissant une formule métaphorique pour l'exprimer ("In the place where I am now", "A l'endroit où je suis maintenant" sachant qu'elle dit plus tôt en interview croire en un "après" la mort), alors que Maarva Andor est plus prosaïque avec un "And now I am dead" ("Et maintenant je suis morte").
Si les formes et les contextes des discours se ressemblent, le fond est loin d'être en reste.
Déjà, les deux discours s'attachent à donner des conseils à leurs auditoires respectifs, avec des formulations similaires, des "I want you to know" ("Je veux que vous sachiez") répétés de la part de Jane Goodall et un "I want you to go on" ("Je veux que vous continuiez") assez catégorique pour le personnage joué par Fiona Shaw.
Dans les deux cas, des systèmes de destruction qui menacent leurs auditoires respectifs de manière directe y sont dénoncés, soit l'écocide généralisé que Jane Goodall impute à un "nous" collectif, et l'Empire que la mère de Cassian Andor compare à une blessure ("a wound"), une noirceur ("a darkness") et même une maladie ("a disease").
Enfin, les deux femmes insistent sur le fait que ces maux ne sont pas inextricables et donnent des conseils pour agir contre et faire en sorte que leurs idéaux perdurent.
Mais, on touche là ce qui semble être la différence fondamentale entre les deux discours. En effet, si Maarva Andor incite à la lutte armée avec un "Fight the empire!" en guise de conclusion, suivi d'ailleurs de la mise en pratique directe de ses principes, Jane Goodall s'évertue à donner des conseils plus d'ordre général à "trouver la force en nous". Si on était de mauvaise foi, on pourrait être tenté de dire que c'est un discours un brin dépolitisé, qui serait tout à fait audible par des grands patrons, à qui elle s'est déjà adressée (lien en anglais).
Cela dit, le début de la vidéo que j'ai mis de côté et qui a inspiré cet article, fait reconsidérer ce constat. En effet, dans ce segment, elle est interviewée par Brad Falchuck sur les personnes qu'elle n'aime pas, et elle cite explicitement: Elon Musk, Donald Trump, Vladimir Poutine, Xi Jinping, Benyamin Netanyahou et "son gouvernement d'extrême droite" comme elle le dit elle-même… qu'elle voudrait envoyer dans l'espace à bord d'une fusée de Musk. Bref, des personnalités que l'on peut raisonnablement qualifier de fascistes, qui ont aussi en commun des visées impérialistes, ceux-là même qui constitueraient l'Empire de Star Wars.
De quoi aiguiser ma curiosité, comme le fait qu'elle parle clairement "d'extrême droite", comme quoi ses paroles sont loin d'être dépolitisées. Je me suis donc demandé si elle faisait le lien entre la destruction de la nature et les fascistes qu'elle dénonce, la rapprochant un peu plus des positions exprimées par le personnage joué par Fiona Shaw. Pour cela, j'ai visionné Famous Last Words en entier pour tenter de trouver la réponse.
Jane Goodall, antifa?
On va tuer le suspense directement: elle effectue le lien entre son combat pour la nature et l'antifascisme dans l'interview et même deux fois.
La première à la suite du passage sur la fusée de Musk, comme on aurait pu s'en douter, qui arrive assez tôt, à la quinzième minute, sur la grosse cinquantaine que constitue l'interview. Après plusieurs questions de Brad Falchuck, elle finit par rapprocher l'époque actuelle, qu'elle décrit comme "sombre", de la deuxième Guerre Mondiale et à rapprocher la résistance britannique contre les nazis de son combat. Elle qualifie d'ailleurs son action de "war" pour "save Mother Nature".
La seconde, intervient de manière un peu plus surprenante, mais aussi plus claire, à la quarante-troisième minute. Après avoir longuement évoqué son action, qu'elle qualifie elle-même de combat, elle parle de la nécessité de lutter contre "this swing to the far right which is harming the environment so terribly", qu'on pourrait traduire par "ce revirement vers l'extrême droite qui détruit si violemment l'environnement".
Et on pourrait très difficilement lui donner tort, tant que ce soit Trump, Musk, Poutine, Netanyahou (lien en anglais), et pour sortir des personnes citées par Jane Goodall, Milei ou Bolsonaro, tous se sont distingués par leur destruction de l'environnement et se positionnent donc comme des ennemis objectifs de la biodiversité.
De ce point de vue, elle se rapproche donc de l'essence de Star Wars qui est une saga qui dépeint une lutte antifasciste, et où c'est particulièrement évident avec Andor.
De plus, le visionnage de l'ensemble de l'interview permet de faire d'autres parallèles avec le discours de Maarva Andor.
Déjà, une partie de l'entretien s'attarde sur le fait qu'elle soit une icone et elle admet avec sincérité "That Jane is a mystery to me" ("cette Jane est un mystère pour moi"), ce que l'on peut rapprocher des avertissements de Maarva Andor avec "not that I want to shine or even be remembered" ("non pas que je veuille la lumière, ou même que l'on se souvienne de moi").
Plus ténu peut-être, Jane Goodall rectifie son interviewer sur le sujet des chimpanzés alpha, notant qu'il en existe qui se basent sur l'approbation du groupe et non la force brute et qu'ils sont plus vertueux. Cela peut faire penser à la valeur du collectif que martèle Maarva Andor avec "because we had each other" ("parce que nous nous avions les uns les autres").
Mais, comme on pouvait le pressentir sur les extraits disponibles sur Bluesky, les deux discours divergent bien sur un point précis: la méthode à adopter pour se battre. Si, Star Wars oblige, Maarva Andor promeut la lutte armée, Jane Goodall est catégorique quant à adopter une méthode non-agressive et dit vouloir convaincre son auditoire. On pourrait penser que cette opposition reflète un vieux dilemme militant entre action directe ou pacifisme, même si les choses peuvent être moins tranchées que ça (lien en anglais).
Enfin, Jane Goodall révèle aussi autre chose qui peut la rapprocher de Star Wars. Elle raconte deux situations où elle a demandé à ce que la pluie cesse de tomber et où ce se serait effectivement produit, lui conférant des pouvoirs shamaniques. A moins que Jane Goodall ne soit en réalité… une Jedi?
On arrive à la fin de ce premier article sur le nouveau blog, qui inaugure une série sur le thème des parallèles.
J'espère que ça vous a plu et n'hésitez pas à venir en parler sur Bluesky si vous en avez envie.